Coco #4 - 19 juin 2020


Douceur.

C’est l’intention collective qui se dégage dès le cercle d’ouverture et d’intentions. Car, pour la première fois en cette quatrième édition, Coco s’est ouverte directement sur le cercle, sans repas partagé. Ce cercle est donc un moment d'atterrissage, après des journées pour beaucoup longues et fatigantes, ou bien un moment de transition pour des êtres ayant encore peu interagi avec d’autres humains, au terme de nos deux mois de réclusion imposée. Parmi les dix présent.e.s, trois n’ont encore jamais participé à une soirée Coco. On est heureureuses de les accueillir dans ce petit cocon, cet appartement où Coco est née, un 14 février, et qui voit revenir, grandi, épanoui, le papillon qu’il a bercé.




D’ailleurs, comme la première fois, c’est le consentement qui est au cœur des interactions guidées. On résiste à la peur de rabâcher, de lasser, car le consentement c’est sexy, oui ! et surtout c’est nécessaire, on peut croire que c’est clair pour tout le monde, mais parfois… C’est pourquoi, on l’a décidé, ce Coco-là va nous faire pousser à toustes des antennes à consentement, grâce auxquelles seront démultipliées les capacités de ressentir l’autre, ses désirs, ses limites, et de les accepter avec gratitude.

Pour commencer, on s’entraîne à exprimer et à recevoir le “non”, d’abord par le langage, dans un jeu enchaînant des questions qui se heurtent immanquablement au même refus, refus accueilli par la personne demandeuse avec un mot de remerciement. Le dialogue vire à l’absurde, des rires éclatent, un peu timides, “est-ce que c'est censé être drôle ?”, puis plus affirmés : la glace est brisée ! On enchaîne, c’est maintenant le corps qui va parler, dire “je peux toucher là ?”, “oui”, “non”, “plutôt ici”, “merci”. Entre deux tintements de bol tibétain (et deux sonneries de réveil), les corps dialoguent. Dans ces échanges de seulement deux minutes par interaction, on s’offre, se refuse, négocie, sans mot dire mais sans fausse note. Et une douce sensualité émerge. De la consigne naît une danse, un flux, le refus n’arrête pas, il redirige, on est concentré.e sur ce qu’exprime l’autre, sur ce que veut exprimer notre corps. Connecté.e.



C’est maintenant le moment du Three Minutes Game - jeu à reproduire chez vous à volonté ! Le bol tibétain, cette fois, retentit toutes les trois minutes, invitant les duos à explorer dans l’intervalle la question “comment veux-tu que je te touche ?”, plus tard “comment veux-tu me toucher ?” et à chaque fois leur réciproque. Être touché.e pour son propre plaisir, toucher pour le plaisir de l’autre. Être touché pour le plaisir de l’autre, toucher l’autre pour son propre plaisir. Se pose la question de ce que l’on veut réellement, sans penser aux attentes de l’autre, car iel est là pour poser explicitement ses désirs et ses limites. Ici, les participant.e.s parlent plus ou moins, négocient, expérimentent. Trois minutes, ça s’annonce long, on a peur de s’ennuyer, d’avoir fait le tour des possibles. Mais au bout du compte, le timing écoulé, on aurait bien continué encore longtemps…



Puis, les duos s’ouvrent, deviennent trios, quatuors, mêlées humaines. Avalanche de mains sur un corps receveur. D’autres préfèrent s’extraire pour profiter du spectacle. On prend le temps, on joue. La sonnette s’efface : la jam est ouverte ! Ce qui n’empêche nullement les jeux du début d’être repris ou détournés, tout au long de la soirée.

C’est un temps et un espace parcourus de lignes. Lignes écrites sur le carnet offert par T à l’inspiration de toustes. Lignes dessinées sur le papier ou sur les corps, ou même passant du papier au corps. Lignes entravant les membres de celleux qui veulent jouer. On dessine des parcours à toucher, on dessine ce qui nous touche. On relie les grains de beauté en lumineuses constellations. On s’attache, tente de se défaire des liens, puis on démêle. Encore et toujours : c'est de l'art social.

Les participant.e.s se (re)découvrent. On éprouve la sensibilité des peaux, la plasticité des corps, les envies de toucher, d’être touché.e des un.e.s et des autres. On bavarde et on rit, ou pas. Légèreté, envol. Gravité inéluctable qui maintient au sol. Groupes qui se forment et se déforment, disparates.



 *


Lors du cercle de clôture, les étoiles qui ornaient les corps ont migré dans les yeux de chacun.e. C’est beau. Et à nouveau, on s’accorde : elle était là, la douceur. Oui, la douceur.



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M.


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