Bulles de volutes
Les chemins sont des lignes tortueuses et individuelles. Des sentiers qui
s'étendent dans le brouillard, où l'on ne voit jamais bien loin. Parfois, les
ombres de buts au long cours se détachent comme des ombres indistinctes, des
phares aux projecteurs réduits à
une vague lueur dans les ombres ouatées des lointains sans contours.
Occasionnellement, on entend des échos, les sentiers d'autres consciences qui
frôlent les nôtres, et parfois, entre alignements volontaristes et
télescopages de paris hasardeux, des sentiers se croisent, font route commune
pour un temps, et un lieu.
Une bulle se naît de ces sentiers mêlés. Un espace qui n'appartient qu'à
celles et ceux qui les
arpentent, qui voient leurs contours, entendent distinctement leurs murmures,
peuvent se parler du sens de leurs mots. Quatre murs de rouges, de bleus et de
verts tournoyants. Un sol tapissé de
confort. Un cercle de sentiers
mêlés, pour un temps librement donné. Deux chemins sont les guides. Leurs mots
et leurs gestes sont des modes d'emploi pour dissiper le brouillard.
Sous leurs paroles, les piliers du cercle s'éparpillent, se regroupent, se
réarrangent au sein d'une bulle qui se tisse de questions simples, de
frôlements, de manifestations de consentement... Tant les sentiers
que celles et ceux qui les arpentent tricotent entre eux une bulle de douceur,
de peau et de tissu, de jute et de graphite qui court sur la feuille
nue.
Les guides se fondent dans ces danses libres du regard de tout chorégraphe
tatillon, les formalités font place à la spontanéité, au ressac des regards,
des envies aux lentes mélopées des mélodies qui accompagnent les sentiers
mêlés. Dans ces instants scintillants de leurs flux éphémères, nous sommes.
Les yeux sont posés sur les yeux, les épaules et le torse. La gaze est un
écrin sous les ronds de lumière qui tournent à l'infini dans leurs couleurs
unies.
Tant que le cercle reste ouvert, tant que la bulle est là, le monde autour de
nous n'existe pas. Il n'y a pas de je, il y a les jeux. Pas de moi, mais
l'émoi. Nous sommes.
Pour ce fragment de temps, pour ce lieu protégé de ses quatre murs,
dérivant dans les douceurs de cet infra-monde tissé de concert, nous
sommes.
V.
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